Page:Tolstoï - Œuvres complètes, vol5.djvu/77

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comment il jouait dans le miroir de l’étang, comment, près du bord, se débattaient de grosses carpes, et, au milieu, à la surface de l’étang, frétillaient de petits poissons. Comment, haut dans le ciel, un vautour planait au-dessus des petits canards qui, en s’ébattant, clapotaient à travers les roseaux, nageaient au milieu ; comment des nuages orageux blancs et échevelés se rassemblaient à l’horizon, comment la vase ramenée par le filet sur le bord se répandait peu à peu, et comment, en traversant la digue, j’entendis de nouveau les coups de battoirs qui se répandaient sur l’étang.

Mais ce battoir, comme deux battoirs accordés en tierce, et ce son, me tourmentaient et me faisaient souffrir, d’autant plus que je savais que ce battoir était une clochette et que Féodor Philippitch ne le ferait pas taire. Et ce battoir, comme un instrument de torture, frappait ma jambe gelée et… je m’endormis.

Je fus éveillé, il me semble, parce que nous galopions très vite et par deux voix qui causaient près de moi.

— Entends-tu ? Eh Ignate ! — disait la voix de mon postillon. — Prends le voyageur, toi, tu dois en tout cas faire ce voyage et moi, pourquoi traînerais-je les chevaux inutilement ! Prends-le !

La voix d’ignate répond près de moi.

— Et quel profit aurai-je d’être responsable ? M’offriras-tu une chopine ?