Page:Tolstoï - Œuvres complètes, vol6.djvu/128

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argent ! — dit Douniacha, irritée. — « Je ne veux pas le voir, » — a-t-elle dit : — donne-le à celui qui l’a apporté.

Doutlov, sans se dresser, fixait ses yeux sur Douniacha.

La tante de Douniacha frappa des mains.

— Mes aïeux ! En voilà une chance ! Mes aïeux !

La deuxième femme de chambre ne pouvait y croire.

— Que dites-vous, Advotia Mikhaïlovna, vous plaisantez !

— Quelle plaisanterie ? Elle a ordonné de le donner au paysan… Eh bien, prends l’argent et va, — dit Douniacha, sans cacher son dépit. — Le malheur des uns fait le bonheur des autres !

— C’est facile à dire. Quinze cents roubles ! — fit la tante.

— Et plus, — dit Douniacha. — Eh bien ! Tu mettras un cierge de dix kopeks à saint Nicolas, — ajouta-t-elle d’un ton moqueur. — Quoi ! tu n’en reviens pas ? Si encore ça tombait à un pauvre, mais lui, il a déjà assez d’argent.

Doutlov comprit enfin que ce n’était pas une plaisanterie ; il rassembla l’argent étalé sur la table pour le compter, puis le mit dans sa poche. Mais ses mains tremblaient pendant qu’il regardait les filles pour se convaincre que c’était sérieux.

— Voilà, il n’en revient pas ; il est heureux, — dit Douniacha, tout en montrant son mépris pour