Page:Tolstoï - Œuvres complètes, vol6.djvu/18

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mordant sa lèvre rouge. Un gros soupir s’échappa de la poitrine de la malade, mais le soupir, sans se terminer, se transforma en toux. Elle se détourna, se crispa, et se prit la poitrine à deux mains. Quand la toux cessa, elle referma les yeux et derechef se tint immobile. Le coupé et la calèche arrivèrent au village.

Matriocha dégagea sa grosse main de son fichu et se signa.

— Qu’est-ce ? demanda la maîtresse.

— Le relais, madame.

— Pourquoi te signes-tu, je te le demande ?

— L’église, madame.

La malade se tourna vers la portière et lentement se signa en regardant, avec de grands yeux, la haute église du village que contournait la voiture.

Les équipages s’arrêtèrent ensemble près du relais.

De la calèche, sortirent le mari de la dame et le docteur. Ils s’approchèrent du coupé.

— Comment vous sentez-vous ? — demanda le docteur en lui tâtant le pouls.

— Eh bien, mon amie, comment vas-tu ? Tu n’es pas fatiguée ? — demanda en français le mari. — Ne veux-tu pas sortir ?

Matriocha arrangeait les paquets et se serrait dans le coin pour ne pas gêner la conversation.

— Rien… toujours de même, — répondit la malade, — je ne sortirai pas.