Page:Tolstoï - Œuvres complètes, vol6.djvu/191

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Dans la suite, en élargissant le cercle de mes observations, je me suis convaincu que ce n’est pas seulement envers nous, chevaux, que la conception mon n’a d’autre base que l’instinct bas et grossier appellé par les hommes le sentiment ou le droit de propriété. L’homme dit : « ma maison » et il ne l’habite jamais et se soucie seulement de sa construction et de son entretien. Le marchand dit : ma boutique, « ma boutique de drap » et il n’a pas l’habit du meilleur drap qui se trouve dans sa boutique.

Il y a des hommes qui appellent la terre la leur, et qui n’ont jamais vu cette terre, qui n’y ont pas marché. Il y a des hommes qui appellent miens d’autres hommes et qui n’ont jamais vu ces hommes, et tout leur rapport envers ces hommes, consiste à leur faire du mal.

Il y a des hommes qui appellent des femmes, « leur femme » ou « leur épouse », et ces femmes vivent avec d’autres hommes. Et les hommes aspirent à la vie non pour faire ce qu’ils jugent bon, mais pour appeler sien le plus grand nombre de choses.

Je suis convaincu maintenant que c’est là la différence essentielle entre nous et les hommes. C’est pourquoi, sans parler déjà de nos autres supériorités sur les hommes, par cela seul nous pouvons dire hardiment que dans l’échelle des êtres vivants nous sommes supérieurs aux hommes. L’activité des hommes, au moins de ceux avec qui je fus en