Page:Tolstoï - Œuvres complètes, vol6.djvu/270

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sait à tous n’en avoir jamais vu de pareille. Sérioja savait que sa taille était belle, mais les louanges d’un étranger comme Kountz le flattaient infiniment.

Il sortit allégé de deux cent cinquante roubles mais fort mal habillé, si mal, que deux jours plus tard son habit devenait la propriété de Vassili et ne restait pour lui qu’un souvenir désagréable. À l’hôtel il descendit en bas, s’assit dans la grande salle, regarda aussi la chambre des habitués et commanda pour son déjeuner un menu si étrange que le garçon même en riait dans la cuisine. Puis il demanda une revue qu’il feignit de lire. Quand le valet, encouragé par l’inexpérience du jeune homme, se mit à l’interroger : « Va à ta place ! » lui répondit Sérioja en rougissant. Mais son accent avait tant de fierté que l’autre obéit. La mère, le père et la fille, de retour à la maison, trouvèrent aussi son costume admirable.

Vous rappelez-vous ce sentiment joyeux de l’enfance, quand, pour le jour de votre fête, on vous a bien habillé, emmené à la messe, et, qu’au retour, l’habit, le visage et l’âme en fête, vous trouvez à la maison des invités et des joujoux. Vous savez qu’aujourd’hui vous n’aurez pas de classe, que même les grands festoient, qu’aujourd’hui, c’est pour toute la maison, jour de repos et de plaisir. Vous savez que vous seul êtes cause de cette fête, et que, quoi que vous puissiez faire,