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Page:Tolstoï - Œuvres complètes, vol6.djvu/316

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l’homme ébouriffé. — Écarte-toi un peu, hein ! On dirait qu’il est cloué !

Le garçon ébouriffé fronça les sourcils encore plus méchamment et se leva. Il s’éloigna sans quitter des yeux la vieille et en continuant à mâcher. Le jeune cocher salua, cessa de jouer et se mit à accorder sa balalaïka, en regardant, tantôt le vieux, tantôt le tailleur, ne sachant quelle attitude prendre envers la vieille. Il se demandait s’il fallait être respectueux parce que la vieille était habillée comme sa mère et sa grand’mère (c’était un postillon pris parmi les paysans), ou moqueur, ce qui lui semblait conforme à sa situation actuelle, son cafetan bleu et ses bottes. Le tailleur, clignant un œil, semblait sourire en tirant l’aiguillée de soie de sa bouche : il regardait aussi. Marina préparait un autre pot ; malgré cette occupation elle observait la vieille, son habileté pour ôter le sac en ne touchant personne et le mettre sous le banc. Nastenka accourut près d’elle et l’aida : elle tira de dessous le banc les bottes qui empêchaient le sac de s’y loger.

— Oncle Pancrate, fit-elle à l’homme à l’air sombre, je mettrai les bottes ici. Ça ne fait rien ?

— Le diable les emporte ! Jette-les même dans le poêle ! — fit-il en les lançant dans un coin.

— C’est bien, Nastka, tu es sage, — dit le tailleur. Il faut toujours soigner un voyageur.

— Que Christ te sauve, ma fille. C’est bien,