Page:Tolstoï - Œuvres complètes, vol6.djvu/33

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La première personne qu’il rencontra dans le couloir fut le garçon de six ans, qui, tout en courant, tâchait d’attraper la fille cadette.

— Eh bien ! Vous n’ordonnez pas de mener les enfants près de leur maman ? demanda la vieille bonne.

— Non, elle ne veut pas les voir. Ça la dérange.

Le garçon s’arrêta un moment et fixa le visage de son père ; et aussitôt, en gambadant et poussant des cris joyeux, il courut plus loin. — C’est le cheval noir, papa, — cria-t-il, en montrant sa sœur.

Cependant, dans l’autre chambre, la cousine était assise près de la moribonde, et, par une conversation habilement conduite s’efforcait de la préparer à l’idée de la mort. Le docteur, près de l’autre fenêtre, préparait une potion.

La malade, en camisole blanche, tout entourée de coussins, était assise sur le lit et, silencieuse, regardait sa cousine.

— Eh ! mon amie, dit-elle en l’interrompant, ne me préparez pas. Ne me considérez pas comme une enfant. Je suis chrétienne. Je sais tout. Je sais que je ne vivrai plus longtemps. Je sais que si mon mari m’avait écoutée plus tôt, je serais en Italie, et que peut-être, sûrement même je serais guérie. Tout le monde le lui disait. Mais que faire, c’est évidemment la volonté de Dieu. Nous sommes