Page:Tolstoï - Œuvres complètes, vol7.djvu/129

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

souriant après un silence. — Eh bien ! nous ferons plus ample connaissance, si vous le voulez bien. Il serra la main de Boris.

— Vous savez, je ne suis pas allé une seule fois chez le comte, il ne m’a pas fait appeler. Je le plains… mais que faire ?

— Et vous pensez que Napoléon réussira à faire passer son armée ? — demanda Boris en souriant.

Pierre comprit que Boris voulait changer la conversation, et, le désirant aussi, il commença à expliquer les avantages et les difficultés de l’entreprise de Boulogne. Le valet vint appeler Boris de la part de la princesse. La princesse partait. Pierre promit de venir dîner et ensuite, pour se lier plus étroitement avec Boris, il lui serra fortement la main en le regardant tendrement dans les yeux, en-dessous des lunettes…

Après son départ, Pierre marcha encore longtemps dans la chambre, mais ne perçait plus de l’épée l’ennemi invisible et souriait au souvenir de ce jeune homme charmant, intelligent et résolu.

Comme il arrive toujours dans la première jeunesse et quand on vit isolé, il ressentit une tendresse sans cause pour ce jeune homme et se promit absolument de se lier d’amitié avec lui. Le prince Vassili accompagnait la princesse. Celle-ci tenait son mouchoir près de ses yeux ; son visage était en larmes.

— C’est terrible, — dit-elle. — Mais, quoi qu’il