Page:Tolstoï - Œuvres complètes, vol7.djvu/153

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— Eh bien, allons. Boris, venez ici, dit Natacha, où donc est Sonia ?

Elle se tourna et n’apercevant pas son amie, elle courut la chercher.

Ne trouvant pas Sonia dans sa chambre, elle courut à la chambre des enfants. Elle n’y était pas non plus ; alors Natacha comprit que Sonia devait être dans le couloir, sur le coffre. Le coffre, dans le couloir, était le lieu de douleur de la jeune génération féminine de la maison des Rostov. En effet, Sonia, froissant sa petite jupe de mousseline rose, était étendue sur l’édredon rayé, crasseux, de la nounou, posé sur le coffre, et le visage enfoui dans ses petites mains, elle sanglotait, en secouant convulsivement ses petites épaules décolletées. Le visage de Natacha, animé et joyeux d’une journée de fête, se troubla tout à coup, ses yeux s’arrêtèrent, son cou tressaillit, les coins de ses lèvres s’abaissèrent.

— Sonia, qu’as-tu ?… que… qu’as-tu ? Hou, hou !… Et Natacha en ouvrant sa large bouche et devenant tout à fait laide, sanglotait comme une enfant, sans cause, et seulement parce que Sonia pleurait. Sonia voulait lever la tête, répondre, mais elle ne le pouvait pas, et se cachait encore plus. Natacha, tout en larmes, s’assit sur l’édredon bleu et embrassa son amie. Enfin, reprenant des forces, Sonia se leva, se mit à essuyer ses larmes et raconta :