Page:Tolstoï - Œuvres complètes, vol7.djvu/165

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— A-t-il pris le remède ?

— Oui.

Le docteur regarda son Bréguet.

— Prenez un verre d’eau bouillie et mettez-y une pincée (de ses doigts effilés il montrait ce que c’est qu’une pincée) de cremortartari

Il n’y a pas de cas qu’après la troisième attaque on reste vivant, — disait un médecin allemand à un aide de camp.

— Et quel bel homme c’était ! — fit l’aide de camp. — Et à qui ira toute cette fortune ? — ajouta-t-il en chuchotant.

— Les amateurs se trouveront, — répondit l’Allemand avec un sourire.

Tous se tournèrent vers la porte qui grinça, et la seconde princesse ayant fait la potion ordonnée par Lorrain, la porta au malade.

Le médecin allemand s’approcha de Lorrain :

— Peut-être traînera-t-il encore jusqu’à demain matin ? — demanda l’allemand en prononçant mal le français.

Lorrain, les lèvres pincées, agita nerveusement et négativement ses doigts devant son nez.

— Cette nuit, pas plus tard, — prononça-t-il à voix basse, avec un sourire décent, satisfait, qui laissait comprendre et exprimait la situation du malade.

Et il s’éloigna.