Page:Tolstoï - Œuvres complètes, vol8.djvu/184

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commence pas, prononça Koutouzov d’une voix sonore et nette, comme pour se préserver de la possibilité de n’être pas entendu. — et dans son visage, quelque chose tremblait. — C’est pourquoi je ne commence pas, sire, parce que nous ne sommes ni à la parade, ni au Champ de Mars.

Dans la suite de l’empereur, sur tous les visages, qui aussitôt se regardèrent, s’exprimèrent le mécontentement et le blâme. « Il a beau être âgé, sous aucun prétexte il ne devrait pas parler ainsi, » voulaient exprimer ces visages.

L’empereur, fixement, attentivement, regardait dans les yeux Koutouzov, attendant s’il n’allait pas dire autre chose : mais, de son côté Koutouzov, inclinant respectueusement la tête, semblait aussi attendre.

Le silence dura près d’une minute.

— Cependant, si Votre Majesté l’ordonne… dit Koutouzov en relevant la tête. — Et, de nouveau, changeant de ton, il parlait comme un général qui ne discute pas mais obéit.

Il poussa son cheval et appelant le chef de la colonne, Miloradovitch, il lui donna l’ordre d’attaquer.

L’armée s’agitait de nouveau et deux bataillons du régiment du Novgorod et un bataillon du régiment d’Apchéron défilèrent devant l’empereur.

Au moment où passait le bataillon d’Apchéron,