Page:Tolstoï - Œuvres complètes, vol9.djvu/228

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dans l’herbe sale ; l’on voyait seulement comment en se couvrant le dos de boue il roulait avec lièvre. Les chiens l’entouraient en étoile. Une minute après tous se trouvaient près des chiens assemblés. L’oncle, tout heureux, descendit et prit le lièvre. Il le secoua pour faire couler le sang et il regardait, tout troublé, en roulant les yeux, ne sachant où mettre ses pieds et ses mains et parlant sans savoir ni avec qui il parlait ni ce qu’il disait.

— Voilà, ça, c’est bon !… En voilà un chien… Voilà, il les a dépassés tous, même ceux de mille roubles. Bon ! dit-il en suffoquant ; il regardait avec colère comme s’il voulait injurier quelqu’un, comme si tous étaient ses ennemis, comme si on l’eût offensé et qu’il eût réussi maintenant à se justifier. Voilà pour les chiens de mille roubles ! Bon ! Rougaï ! En voilà un morceau, tu l’as mérité, dit-il en jetant au chien la patte arrachée, maculée de terre. Bon !

— Elle était fatiguée, elle seule a couru trois fois, dit Nicolas, n’écoutant personne et sans se soucier si on l’écoutait ou non.

— Mais qu’est-ce que c’est, comme ça, en travers ?… disait le chasseur d’Ilaguine.

— Oui, mais de cette façon n’importe quel chien de garde attrape, dit en même temps Ilaguine, tout rouge, respirant à peine de la course et de l’émotion. En même temps Natacha, toute suffo-