Page:Tolstoï - Œuvres complètes, vol9.djvu/339

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

comte mi-plaisant mi-sérieux. Mais Natacha remarqua que son père se hâtait en entrant dans le vestibule et qu’il demandait timidement, à voix basse, si le prince et la princesse étaient chez eux. Quand leur arrivée fut annoncée, un trouble quelconque se produisit parmi les valets du prince : le valet qui était parti les annoncer était arrêté par un autre valet, dans la salle, et ils chuchotaient quelque chose.

Une femme de chambre accourut dans la salle, et aussi en se hâtant dit quelque chose en mentionnant la princesse. Enfin un vieux valet parut ; avec un visage sévère il informa Rostov que le prince ne pouvait le recevoir, mais que la princesse les demandait chez elle. Mademoiselle Bourienne vint la première à la rencontre des hôtes. Elle salua le père et la fille avec une politesse particulière et les conduisit chez la princesse. Celle-ci, le visage ému, effrayé, couvert de taches rouges, vint, d’un pas lourd, à la rencontre des visiteurs, en tâchant, mais en vain, de paraître à l’aise et accorte. Du premier coup d’œil Natacha ne plut pas à la princesse Marie. Elle lui parut trop bien habillée, frivole, gaie et vaniteuse. La princesse Marie ne se rendait pas compte qu’avant d’avoir vu sa future belle-sœur elle était déjà mal disposée envers elle par l’envie involontaire pour sa beauté, sa jeunesse et son bonheur, et par jalousie de l’amour de son frère. Outre ce sentiment invincible d’anti-