Page:Tolstoï - Œuvres complètes vol27.djvu/187

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marier n’ait jamais provoqué un sentiment d’amour dans le cœur d’un autre homme ? Qu’aurait dû faire Hélène ?

— Cyrille, notre ancien, disait ceci : Dans le monde païen, les hommes, sans avoir pensé au devoir d’aimer leurs semblables comme des frères, sans avoir rien fait pour développer ce sentiment, ne recherchent qu’une chose : exciter dans leur cœur l’amour passionné de la femme, et ils développent en eux cette passion. C’est la raison pour laquelle toute Hélène, ou toute femme ressemblant à Hélène, excite la passion de plusieurs hommes. Les rivaux combattent l’un contre l’autre et tâchent à l’emporter, comme des bêtes pour une femelle, et leur mariage est toujours plus ou moins un viol.

— Dans notre communauté, non seulement nous ne pensons jamais à jouir personnellement de la beauté, mais nous évitons tout ce qui pourrait nous tenter, tout ce dont le monde païen fait un objet d’adoration. Au contraire nous pensons au devoir de respect et d’amour envers le prochain, que nous avons envers chacun indifféremment, quelle que puisse être sa beauté ou sa monstruosité. Nous cultivons de toutes nos forces ce sentiment, et chez nous l’amour du prochain l’emporte sur les séductions de la beauté. Il détruit ainsi tout prétexte aux querelles et aux discordes qui ont leur source dans les relations des sexes. Un chrétien ne