Page:Tolstoï - A la recherche du bonheur.djvu/165

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deux allaité, je prenais le troisième ; et Dieu me fit la grâce de les élever. Le mien mourut deux ans après, et Dieu ne me donna plus d’enfants. Cependant nous avons acquis du bien, nous vivons maintenant au moulin, chez un marchand. Nous avons de bons gages, la vie est facile, mais je n’ai pas d’enfants. Que ferais-je si je n’avais ces fillettes ? Je serais seule. Comment ne pas les aimer, les choyer ? Elles sont la joie de mes yeux, la cire de mon cierge[1].

La femme pressa les enfants sur son cœur, embrassa la boiteuse et essuya ses yeux remplis de larmes.

« On vit sans père ni mère, on ne vit pas sans Dieu, » dit le proverbe.

Ainsi parlèrent-ils, et la femme allait s’en aller. Comme les patrons la reconduisaient, ils se retournèrent vers Mikhaïl, et lui restait les

  1. Terme d’affection. — Locution populaire.