Page:Tolstoï - A la recherche du bonheur.djvu/171

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humaines, ni le froid, ni la faim. Je devins homme, j’eus faim, j’eus froid, et ne sus que devenir. Je vis une chapelle consacrée à l’Éternel, je voulus m’y réfugier ; la porte était cadenassée. Ne pouvant entrer, je m’assis sur le seuil, cherchant à m’abriter contre la bise. Le soir vint, j’eus froid, j’eus faim, je souffrais, je tremblais, la douleur me prit tout entier. Soudain, j’entendis des pas sur la route, un homme venait portant des bottes ; il parlait tout seul. Je vis pour la première fois la face mortelle de l’homme, depuis que j’étais devenu homme moi-même, et j’eus peur de cette face ; je me détournai. Je l’entendais qui se parlait à lui-même :

— Comment nourrir ma femme et mes enfants ? Comment, pendant l’hiver, abriter contre le froid nos membres engourdis ?

Et je pensais :

— Je péris de froid et de faim, et voilà cet