Page:Tolstoï - Contes et fables, 1888.djvu/251

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Se promène à travers la salle
Et demande au chevalier Soukhman :
— Eh bien, Soukhman, tu ne m’apportes pas
Un cygne blanc non ensanglanté ?
Et Soukhman dit les paroles suivantes :
— Hoï[1], Vladimir-le-Duc, au bord du Dnieper
Ce n’est pas aux cygnes que j’avais à penser.
Je rencontrai au delà du fleuve Dnièper
Une force armée de quarante mille
De méchants Tartares qui marchaient sur la ville de Kiev.
Ils construisaient des ponts, du matin au soir,
Et la rivière Dnièper les emportait la nuit,
Mais elle était à bout de forces.
Je lançai alors mon cheval contre ces Tartares,
Et je les battis tous jusqu’au dernier.
Vladimir, — le Duc, — le beau Soleil,
N’eut pas confiance en ces paroles.
Il ordonna à ses fidèles serviteurs
De prendre Soukhman par ses bras blancs,
Et de l’enfermer dans de profonds caveaux.
Et il envoya vers le Dnièper Dobrynouchka[2]
Pour se convaincre des exploits de Soukhman.
Dobrynouchka se dressa sur ses jambes agiles,
Il harnacha son rapide coursier,
Il courut dans les champs jusqu’au fleuve.
Là il vit, gisant à terre, une force armée
De quarante mille guerriers exterminés.

  1. Exclamation ancienne chez les Slaves, employée en s’adressent aux grands seigneurs.
  2. Nom d’un chevalier athlète.