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Page:Tolstoï - Guerre et Paix, Hachette, 1901, tome 1.djvu/372

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pauvre petite figure lui répétait aussi : « Qu’avez-vous fait de moi » ? Il se détourna brusquement après l’avoir regardée.


Cinq jours plus tard, le nouveau-né fut baptisé : la sage-femme retenait les langes avec son menton, pendant que le prêtre oignait d’huile sainte, avec les barbes d’une plume, la paume des mains et la plante des pieds du petit prince Nicolas Andréïévitch.

Le grand-père, après l’avoir porté, en sa qualité de parrain, autour du vieux baptistère, s’était empressé de le remettre entre les mains de la marraine, la princesse Marie. Le père, tout ému, et redoutant que le prêtre ne laissât tomber l’enfant dans l’eau, attendait avec anxiété dans la pièce voisine la fin du sacrement ; aussi le regarda-t-il d’un air satisfait, lorsque la vieille bonne le lui apporta, et il lui répondit par un signe de tête amical à la bonne nouvelle qu’elle lui donna que le morceau de cire, sur lequel on avait mis quelques petits cheveux coupés sur la tête du nouveau-né, avait surnagé[1].


X

Grâce au vieux comte, il ne fut pas question de la part que Rostow avait prise au duel de Dologhow et de Besoukhow, et au lieu d’être dégradé, comme il s’y attendait, il fut nommé aide de camp du général gouverneur de Moscou, ce qui l’empêcha d’aller passer l’été à la campagne avec sa famille, et l’obligea de rester en ville. Dologhow se lia plus intimement avec lui. La vieille Marie Ivanovna aimait passionnément son fils, et disait souvent à Rostow qu’elle l’avait pris en affection à cause de son amitié pour son Fédia :

« Oui, comte, son âme est trop noble et trop pure pour notre monde si corrompu. Personne n’apprécie la bonté à sa juste valeur, car malheureusement, chacun y voit un reproche à son adresse… Est-ce juste, est-ce honorable, je vous le demande,

  1. En coupant les cheveux du nouveau-né, le prêtre accomplit un des rites du baptême, et un usage superstitieux les fait déposer sur un morceau de cire qu’on jette dans l’eau lustrale. Si la cire flotte à la surface, c’est un bon présage ; si elle va au fond, c’est mauvais signe.(Note du trad.)