Page:Tolstoï - Hadji Mourad et autres contes.djvu/42

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derrière eux, et un bruit de voix. Hadji Mourad poussa son cheval au trot. Les cavaliers qui galopaient derrière bientôt rejoignirent Hadji Mourad. Ils étaient une vingtaine. C’étaient les habitants de l’aoul qui avaient résolu d’arrêter Hadji Mourad, ou, au moins, pour se justifier devant Schamyl, de feindre l’intention de l’arrêter. Quand ils furent assez rapprochés pour être distincts dans l’obscurité, Hadji Mourad s’arrêta, abandonna les rênes, et, d’un mouvement habituel, de la main gauche débouclant l’étui du fusil, de la droite il le sortit. Eldar fit la même chose. — Que vous faut-il ? cria Hadji Mourad. Vous voulez me prendre ? Eh bien, prenez ! et il ajusta son fusil.

Les habitants de l’aoul s’arrêtèrent. Hadji Mourad tenant son fusil à la main se mit à descendre le ravin. Les cavaliers, sans se rapprocher, le suivirent. Quand Hadji Mourad eut franchi le ravin, les cavaliers qui le poursuivaient lui crièrent d’écouter ce qu’ils voulaient lui dire. En réponse, Hadji Mourad tira et lança son cheval au galop. Quand il l’arrêta on n’entendait plus ni la poursuite, ni les coqs ; on entendait seulement plus distinctement dans la forêt le murmure de l’eau, et, de temps en temps, les hululements des hiboux. Le mur noir de la forêt était tout proche ; c’était cette même forêt dans laquelle l’attendaient ses murides.

Arrivé à la forêt, Hadji Mourad s’arrêta, et, ayant repris haleine, siffla, puis, silencieux, prêta l’oreille.