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l’église et l’état

si sot, qu’on ne pourrait s’y laisser prendre. Cette soumission générale de l’humanité à la tromperie, m’a même fait reconnaître l’importance du phénomène qui en est cause ; et ainsi convaincu, je me suis mis à étudier la doctrine chrétienne, base de la tromperie de toute l’humanité chrétienne. C’est ce qui résulte de mes observations au point de vue général. Mais au point de vue personnel, c’est-à-dire en partant de l’idée que chaque homme et moi devons, pour vivre, avoir foi dans le sens de la vie, et avons cette foi, le fait de la violence exercée en faveur de la foi est encore plus surprenant d’insanité.

En effet : comment, pourquoi et à qui peut-il être nécessaire qu’un autre, non seulement croie comme moi, mais professe comme moi ? L’homme vit, donc il connaît le sens de la vie. Il a établi son rapport envers Dieu, il connaît donc la vérité des vérités, et moi aussi je la connais. Leurs expressions doivent être différentes, leur sens doit être le même étant tous deux des hommes.

Comment, pourquoi, puis-je être contraint d’exiger de n’importe qui qu’il exprime sa vérité comme moi ?

Je ne puis ni par la violence, ni par la ruse, ni

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