Page:Tolstoï - La Sonate à Kreutzer trad Pavlovsky.djvu/179

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Et je sens que la crise épouvantable approche où je voudrais la tuer ou me tuer moi-même. Je sais qu’elle approche, j’en ai peur comme du feu, je voudrais me contenir. Mais la rage envahit tout mon être. Ma femme se trouve dans le même état, pis peut-être ; elle comprend qu’elle déforme chacun de mes mots à dessein, et chacun de ses mots à elle est imbibé de venin. Tout ce qui m’est cher, elle le ravale et le profane. Plus la querelle va, plus la fureur monte. Je crie : « Tais-toi ! » ou quelque chose de semblable. Elle bondit hors de la chambre, elle court auprès des enfants. Je cherche à la retenir pour finir mes injures, je la saisis par le bras, et je lui fais mal. Elle crie : « Enfants, votre père me bat ! » Je crie : « Ne mens pas ! » Elle continue à articuler des mensonges dans le simple but de m’irriter davantage ! « Ah ! ce n’est pas la première fois ! » ou quelque chose dans ce genre. Les enfants s’élancent vers elle et la tranquillisent, je dis : « Ne feins pas ! » Elle dit : « Tout est feinte pour toi ! Tu tuerais