Page:Tolstoï - Le Faux Coupon et autres contes.djvu/110

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XVII


Dans l’in pace du couvent de Sousdal quatorze ecclésiastiques étaient détenus, et presque tous pour avoir renoncé à l’orthodoxie. C’était là qu’avait été aussi envoyé Isidore. Le père Missaïl reçut Isidore, d’après l’indication des papiers, et, sans causer avec lui, ordonna de l’enfermer dans une cellule, comme criminel important. Il y avait deux semaines que le père Isidore était en prison quand le père Missaïl fit le tour des prisonniers. Il entra chez Isidore et lui demanda s’il avait besoin de quelque chose.

— J’ai besoin de beaucoup de choses, répondit-il ; mais je ne puis te le dire devant témoins. Donne-moi l’occasion de te parler en tête-à-tête.

Leurs regards s’étant rencontrés, Missaïl comprit qu’il n’avait rien à craindre, et il donna l’ordre de conduire Isidore dans sa cellule. Une fois seuls il lui dit :

— Eh bien, parle…

Isidore tomba à genoux.

— Frère, dit Isidore, que fais-tu ? Aie pitié de toi-même. Il n’est pas de criminel pire que toi. Tu as foulé aux pieds tout ce qui est sacré…

Un mois après, Missaïl envoyait une requête dans laquelle il demandait qu’on libérât comme repentis, non seulement Isidore mais tous les autres, et lui-même demandait à être envoyé dans un couvent pour se reposer.


XVIII


Dix ans se sont écoulés. Mitia Smokovnikoff a terminé ses études à l’école technique ; il est maintenant ingénieur, avec de gros appointements, dans des mines d’or en Sibérie. Il avait besoin d’aller