Page:Tolstoï - Le Prince Nekhlioudov.djvu/33

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

— Quelle vie pourrais-je donc y mener ?… Juge toi-même : c’est un endroit inhabité, où l’eau est inconnue. Il n’y a pas de pâturage. Ici, les chènevières sont travaillées, labourées, fumées ; là-bas, quoi ? Qu’est-ce qu’il y a ? Rien, la terre nue. Pas de haies, pas de hangars pour sécher les gerbes, rien. Nous nous ruinerons, Excellence, si tu nous envoies là.

Il ajouta en hochant négativement la tête :

— C’est un endroit inconnu, tout neuf…

Nekhlioudov essayait de démontrer au moujik que ce changement lui était au contraire très avantageux, que l’on planterait des haies, que l’on construirait des hangars, que l’eau était bonne, etc., etc., mais le silence de Tchouricenok l’embarrassait et, malgré lui, il sentait qu’il ne disait pas ce qu’il fallait pour le convaincre. Quand le