Page:Tolstoï - Le salut est en vous.djvu/166

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veulent nullement s’en apercevoir, et ils espèrent toujours trouver une combinaison qui décide les gouvernements à limiter eux-mêmes leur pouvoir.

« Peut-on conjurer la guerre ? écrit un savant dans la Revue des Revues.

« Tout le monde s’accorde à reconnaître que, si jamais elle éclate en Europe, elle aura des conséquences peut-être égales à celles des grandes invasions. Elle mettra en cause l’existence même des nationalités, et, par suite, elle sera sanglante, acharnée, atroce.

« Aussi bien, cette considération jointe à celle des engins terribles de destruction dont dispose la science moderne retarde-t-elle peut-être la déclaration et maintient-elle les choses dans cet état qui pourrait être reculé jusqu’à des limites indéfinies, n’étaient les charges énormes qui accablent les nations européennes et menacent en se prolongeant d’aboutir à des ruines et à des désastres aussi grands que ceux produits par la guerre même.

« Frappées de ces idées, les personnes de tous les pays ont cherché les moyens pratiques soit d’arrêter ou tout au moins d’atténuer les effets de l’effroyable tuerie dont la menace est suspendue sur nos têtes.

« Telles sont les questions mises à l’ordre du jour par l’ouverture prochaine du Congrès universel de la Paix à Rome, et la publication d’une récente brochure sur le Désarmement.

« Il est malheureusement trop certain que, avec l’organisation actuelle de la plupart des états modernes, isolés les uns des autres et dirigés par des intérêts distincts, la suppression absolue de la guerre est une illusion dont il serait dangereux de se leurrer. Cependant, des lois et des règlements plus sages imposés à ces duels entre nations auraient au moins pour effet d’en circonscrire les horreurs.