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Page:Tolstoï - Le salut est en vous.djvu/243

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maintenions en servitude et t’empêchions de résister à nos ordres par la violence ; 3o choisis, élis ou fais-toi élire comme prétendu participant au gouvernement, en sachant bien que l’administration s’effectuera indépendamment des discours stupides que tu prononceras dans des assemblées d’hommes tels que toi, et qu’elle ne sera faite que d’après la volonté de ceux qui ont en mains la force armée ; 4o viens à certaines époques au tribunal et participe à toutes les cruautés insensées que nous commettons sur des hommes égarés ou corrompus par nous-mêmes, sous forme d’emprisonnement, de réclusion et d’exécutions ; 5o enfin et par-dessus tout, en si bons rapports que tu te trouves avec les hommes des autres nations, aussitôt que nous te l’ordonnerons, considère-les comme tes ennemis et concours personnellement ou par un mercenaire à les ruiner, les faire prisonniers, les tuer, hommes, femmes, enfants, vieillards, peut-être même tes compatriotes et jusqu’à tes parents s’il le faut. »

Que pourrait répondre tout homme sensé ?

« Mais pourquoi le ferais-je ? devrait-il dire, semble-t-il, pourquoi promettrais-je d’obéir aujourd’hui à Salisbury, demain à Gladstone ; aujourd’hui à Boulanger, demain à une chambre composée d’hommes semblables à Boulanger ; aujourd’hui à Pierre III, demain à Catherine II, après-demain à l’imposteur Pougatchev ; aujourd’hui au roi fou de Bavière, demain à Guillaume ? Pourquoi promettrais-je d’obéir à des hommes notoirement mauvais ou légers, ou qui ne me sont pas connus du tout ? Pourquoi, sous forme d’impôt, leur abandonnerais-je le produit de mon travail, sachant que cet argent sert à acheter des fonctionnaires, à construire des prisons et des églises, à entretenir l’armée, et à d’autres mauvaises choses destinées à m’opprimer ? Pourquoi