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Page:Tolstoï - Le salut est en vous.djvu/81

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pas rejeté ces hommes particulièrement doués de Dieu, qui, à l’époque du christianisme pur, eussent été hautement honorés ? Et, par contre, ces hommes qui, pendant la décadence du christianisme, se sont élevés eux-mêmes au-dessus des autres et se sont déclarés les propagateurs du christianisme pur, n’eûssent-ils pas été, au temps des apôtres et des disciples du Christ, reconnus pour hérétiques et antichrétiens éhontés ? »

En exprimant entre autres choses, dans ces questions, l’idée que l’expression verbale de la foi, exigée par l’église et dont tout écart était considéré comme une hérésie, n’a jamais pu contenir complètement la conception même du croyant, et que, par suite, cette exigence de l’expression de la foi par certaines paroles provoquait des hérésies, il dit (question 21) : « Et si les actes et les pensées de Dieu apparaissent à l’homme si grands et si profonds qu’il ne puisse trouver de paroles correspondantes pour les exprimer, doit-on le regarder comme hérétique parce qu’il ne peut traduire exactement ce qu’il sent ? » Et dans la question 33 : « Et n’est-ce pas pour cette cause que dans les premiers temps du christianisme il n’y avait pas d’hérésies, puisque les hommes se jugeaient les uns les autres non sur des paroles, mais suivant le cœur et les actes, ayant pleine liberté d’exprimer leur pensée sans crainte d’être accusés d’hérésie ? » — « L’église n’employait-elle pas le moyen le plus facile et le plus ordinaire, dit-il dans sa 31e question, en rendant suspects les gens dont le clergé voulait se défaire, et en jetant sur eux le manteau de l’hérésie ? »

« Bien qu’il soit vrai, dit-il plus loin, que ceux qu’on appelait hérétiques péchaient et se trompaient aussi, il est non moins vrai et non moins évident, par les innombrables exemples cités ici (c’est-à-dire dans l’histoire de