Je le relisais bien souvent, et chaque fois j’éprouvais le même enthousiasme, le même attendrissement à la lecture de ces versets qui exhortent à présenter la joue, à abandonner sa tunique, à être en paix avec tout le monde, à aimer ses ennemis, mais aussi le même désappointement.
Les Paroles de Dieu addressées à chacun n’étaient pas claires. Elles exhortaient à un renoncement par trop absolu qui anéantissait la vie même, comme je la comprenais, et par conséquent renoncer à tout ne pouvait pas, me semblait-il, être la condition essentielle du salut. Et du moment que cela cessait d’être une condition absolue, il ne restait plus rien de précis et de clair.
Je ne lisais pas seulement le sermon sur la Montagne, je lisais tous les Évangiles et tous les commentaires théologiques des Évangiles. Les explications théologiques qui disaient que les sentences du sermon sur la Montagne servent à indiquer le degré de perfection auquel doit tendre l’homme, mais que l’homme déchu, plongé dans le péché, ne peut pas y atteindre ; que le salut de l’homme est dans la foi, la prière et la grâce, — ces explications ne me satisfaisaient pas.
Je ne pouvais pas les admettre. Je trouvais singulier que Jésus, connaissant d’avance l’impossibilité pour un homme de pratiquer sa doctrine par ses propres forces, donnât pourtant des règles aussi claires qu’admirables, qui s’adressent directement à chaque homme en particulier.
En lisant ces règles, je me sentais pénétré de la joyeuse assurance que je pouvais, à l’instant, sur l’heure, commencer à pratiquer tout cela. Je le désirais