Page:Tolstoï - Ma religion.djvu/154

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trine chrétienne) était de beaucoup au-dessus de cette conception. Mais nous sommes tellement certains que cette superstition est quelque chose de très élevé, que nous la citons précisément comme preuve de la supériorité de notre doctrine sur celle des Chinois ou des Hindous, par exemple, qui n’y croient pas. Ce ne sont pas uniquement les théologiens qui font ce raisonnement, mais aussi les libres penseurs, les historiens érudits des religions — Tiele, Max Muller et d’autres. Dans leur classification des religions, ils mettent au premier rang celles qui partagent la superstition de la résurrection et les déclarent bien supérieures à celles qui ne la partagent pas. Le libre penseur Schopenhauer appelle carrément la religion hébraïque la plus vile de toutes parce qu’on n’y trouve pas de vestige de cette croyance. Le mot, pas plus que l’idée, n’existait en effet dans la religion judaïque. La vie éternelle se traduit en hébreu : « haïée-oïlom ». « Oïlom » veut dire l’infini ; ce qui est permanent dans les limites du temps ; Oïlom veut dire aussi monde, « cosmos ». La vie universelle et à plus forte raison la vie éternelle, haïée-oïlom, est, selon la doctrine judaïque, la propriété de Dieu seul. Dieu est le Dieu de la vie, le Dieu vivant. L’homme, selon l’idée hébraïque, est toujours mortel. Dieu seul est toujours vivant. Dans le Pentateuque, l’expression « vie éternelle » se rencontre deux fois : une fois dans le Deutéronome et une fois dans la Genèse. Dans le Deuteronome, Dieu dit (chap. xxxii, 39-40) : « Sachez donc que c’est moi qui suis Dieu et qu’il n’y a pas de Dieu près de moi ; je fais vivre et je fais mourir, je blesse et je guéris ; nul ne saurait se soustraire à ma main, car je lève ma main jusqu’au ciel et je dis :