Page:Tolstoï - Ma religion.djvu/240

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Pour tout ce qui constitue la vie de l’homme, l’ensemble de ses actes, quand il faut qu’il opte entre tuer ou ne pas tuer, juger ou ne pas juger, élever ses enfants ainsi ou autrement, — pour tout cela, les personnes de notre monde se fient sans objection à des gens qui, pas plus qu’elles-mêmes, ne savent pourquoi ils vivent et pourquoi ils prescrivent aux autres de vivre d’une certaine façon et pas d’une autre.

Et c’est une pareille existence que les hommes considèrent comme raisonnable, et ils n’en ont pas honte !

L’antagonisme entre les explications de l’Église, qui passent pour la foi, et la vraie foi de notre génération, qui consiste à obéir aux lois sociales et à celle de l’État, est entré dans une phase aiguë, et la majorité des gens civilisés n’a pour régler sa vie que la foi dans le sergent de ville et la gendarmerie.

Cette situation serait épouvantable si elle était complètement telle ; mais heureusement il y a des gens, les meilleurs de notre époque, qui ne se contentent pas de cette religion, mais qui ont une foi toute différente, relativement à ce que doit être la vie des hommes.

Ces hommes sont considérés comme les plus malfaisants, les plus dangereux et principalement les plus incroyants de tous les êtres, et pourtant ce sont les seuls hommes de notre temps croyant à la doctrine évangélique, si ce n’est dans son ensemble, au moins en partie.

Ces gens ne connaissent pas le plus souvent la doctrine de Jésus, ne la comprennent pas, et n’admettent pas, tout comme leurs adversaires, la base principale de la religion de Jésus, qui est de ne pas