Page:Tolstoï - Polikouchka.djvu/234

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

tendu là j’apercevais, à travers les tiges rouges et épineuses des églantiers, la terre sèche et noire, le miroir bleu tendre de l’étang. C’était un sentiment de satisfaction naïve mêlée de mélancolie. Autour de moi, tout était beau ; cette beauté agissait si vivement sur moi, qu’il me semblait que j’étais beau moi-même. Une seule chose me chagrinait, c’était que nul ne s’émerveillât de me voir ainsi.

Il fait chaud. J’essaie de m’endormir pour me soulager, mais les mouches, les insupportables mouches ne me laissent pas, même ici, une minute de répit. Elles accourent en foule, s’obstinent contre moi, et me sautent du front sur les mains avec un bruit de petits os. Les abeilles bourdonnent, pas loin de moi, juste au plus fort de la chaleur ; des papillons aux ailes jaunes, comme fanés, voltigent d’une herbe à l’autre.