Page:Tolstoï - Quelle est ma vie ?.djvu/11

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Ils m’intéressaient aussi parce que, depuis mon arrivée à, Moscou, j’avais pris l’habitude, par mesure d’hygiène, d’aller tous les jours travailler avec deux moujiks qui sciaient du bois sur les montagnes des Moineaux (Vorobiovy Gory). Ces paysans étaient tout à fait semblables aux mendiants que je rencontrais dans les rues. L’un d’eux nommé Pierre, soldat du gouvernement de Kalouga, l’autre Simion, paysan du gouvernement de Vladimir. Ils ne possédaient que les vêtements qui leur couvraient le corps et leurs bras pour travailler. Et avec ces bras ils gagnaient à un rude travail, de 40 à 45 kopecks par jour, dont ils mettaient une partie de côté, Pierre pour acheter une pelisse et Simion pour recueillir la somme nécessaire pour regagner son village. C’est pourquoi, rencontrant dans la rue des hommes pareils à ceux-ci, je m’intéressai particulièrement à eux.

Pourquoi les uns travaillent-ils et les autres mendient-ils ?

Quand je rencontrais un de ces moujiks, je le questionnais habituellement sur ce qui l’avait amené à cette situation ?

Un jour, je rencontre un moujik à barbe grisonnante, bien portant, qui me demande l’au-