Page:Tolstoï - Quelle est ma vie ?.djvu/81

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fausse dans mon rôle de bienfaiteur. Je le pris chez moi et l’installai à la cuisine. Je ne pouvais, bien entendu, admettre ce garçon pouilleux parmi mes enfants ? Je me croyais déjà très bon et trés généreux en le laissant soigner et nourrir par ma cuisinière et en lui donnant des vêtements usés. Le garçon resta chez moi une semaine. Pendant cette semaine, je lui dis, en passant, quelques mots, par deux fois, et me ren- dis, en me promenant, chez un cordonnier que je connaissais pour lui offrir d’admettre ce garçon chez lui comme apprenti. Un moujik, qui était venu me rendre visite, l’invita à venir à sa maison à la campagne comme travailleur ; le garçon refusa et disparut. Au bout d’une semaine, je me rendis à la maison Rjanof pour m’informer de lui. Il y était retourné, mais ne se trouvait pas là quand j’y vins. Depuis deux jours il se rendait a Presnenstrië proudï[1] où il s’était engagé pour 30 kopecks par jour dans une troupe habillée de costumes de sauvages, qui promenait un éléphant. Il y avait ce jour-là représentation publique. Je me rendis

  1. Etang et quartier de Moscou où se trouve le Jardin des plantes.