vendant des chevaux. Gravila, un peu excité par les fumées du festin, ne put maîtriser sa colère ; il frappa la jeune femme, qui était en état de grossesse et qui fut obligée de garder le lit durant une semaine. Ce fut pour Ivan un morceau de haut goût. Il porta plainte aussitôt, en se disant : « Cette fois, je le tiens : me voilà délivré de mon mauvais génie, la Sibérie m’en débarrassera pour toujours. » Mais ses prévisions ne se réalisaient pas. Le juge d’instruction n’accueillit pas la plainte, car, la jeune femme ayant été examinée, on ne put découvrir sur elle aucune trace de mauvais traitements. Ivan s’adressa au juge de paix, qui, à son tour, le renvoya au tribunal. N’épargnant ni les frais ni les peines, Ivan alla au tribunal, gagna le président et le greffier en leur donnant à chacun un muids d’eau-de-vie douce ; il se démena tant que Gravila fut enfin condamné. Le jugement, dont la lecture fut faite en séance publique, portait que : « Gravila Gordoi était punissable de vingt coups de bâton, à recevoir sur les reins, dans la cour de la maison de district. »
Page:Tolstoï - Scenes de la vie russe.djvu/186
Apparence