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Page:Tolstoï - Souvenirs.djvu/200

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société appartenais-je dans la pensée de ces moines qui me regardaient ? Et ils me regardaient avec attention. Je me dirigeai pourtant dans la direction indiquée par le jeune moine.

Un vieillard vêtu de noir, ayant de gros sourcils blancs, me croisa dans le sentier qui conduisait à la cellule et me demanda ce que je voulais.

J’eus un instant envie de répondre : « Rien du tout, » de me sauver, de rejoindre mon droschki et de retourner à la maison. Cependant, malgré ses gros sourcils, le visage du vieillard inspirait la confiance. Je répondis que j’avais besoin de voir mon confesseur, que je lui nommai.

« Venez, petit barine ; je vais vous conduire, dit-il en retournant sur ses pas (il avait évidemment deviné tout de suite ma situation et ce que je voulais). Le Père est à matines ; il va venir tout de suite. »

Il ouvrit la porte, me fit entrer dans une antichambre très propre, traversée par une bande de tapis de chanvre, et m’introduisit dans la cellule.

« Là, me dit-il avec une expression bienveillante qui calmait ; vous allez attendre un peu ici. »

Il sortit.

La pièce où je me trouvais était exiguë et très propre. Pour tout mobilier, une petite table recouverte en toile cirée et placée entre deux petites fenêtres à doubles battants, deux pots de géranium sur les fenêtres, la petite armoire aux saintes images, au-dessus de laquelle pendait une petite lampe, un fauteuil et deux chaises. Dans un coin, appliquée au mur, une horloge au cadran orné de fleurs-peintes et aux poids suspendus à des chaînettes de cuivre. Deux soutanes étaient accrochées à des clous sur une cloison à demi-hauteur, rejointe au plafond par des barreaux de bois passés à la chaux ; le lit était probablement derrière la cloison.

Les fenêtres donnaient sur une muraille blanche, distante