Page:Tolstoï - Une lettre inédite.djvu/24

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

dans le livre intitulé Que faire ? qui, à ce qu’on m’a dit, a été traduit en français. Je n’ai jamais envisagé le travail manuel comme un principe, mais comme l’application la plus simple et naturelle du principe moral, celle qui se présente la première à tout homme sincère.

Le travail manuel dans notre société dépravée — la société des gens dits civilisés — s’impose à nous uniquement par la raison que le défaut principal de cette société a été, et est jusqu’à présent celui de se libérer de ce travail et de profiter, sans lui rendre la pareille, du travail des classes pauvres, ignorantes et malheureuses, qui sont esclaves, comme les esclaves du vieux monde.

La première preuve de la sincérité des gens de cette société, qui professent des principes chrétiens, philosophiques ou humanitaires, est de tâcher de sortir autant que possible de cette contradiction.

Le moyen le plus simple et qui est toujours sous main pour y parvenir, est le travail manuel qui commence par les soins de sa propre personne. Je ne croirai jamais à la sincérité des convictions chrétiennes, philosophiques ou humanitaires, d’une personne qui fait vider son pot de chambre par une servante.

La formule morale la plus simple et courte, c’est de se faire servir par les autres aussi peu que pos-