artificiers, l’un, un vieux à cheveux gris, la poitrine ornée d’une masse de médailles et de croix, auxquelles manquait pourtant celle de Saint-George ; l’autre, un jeune homme fumant des cigarettes qu’il roulait ; et le tambour, qui s’était mis, comme toujours, aux ordres de l’officier, dans le fond. Dans l’ombre à l’entrée, derrière le bombardier et les soldats médaillés assis en avant, se tenaient les « humbles », qui furent les premiers à rompre le silence. Un des leurs accourant tout effaré du dehors avec grand bruit servit de thème à leur causerie.
« Eh ! dis donc, tu n’es pas resté longtemps dans la rue ? Les jeunes filles ne s’y amusent pas, hein ? dit une voix.
— Au contraire, elles chantent des chansons merveilleuses, on n’en entend pas de pareilles au village, répondit en riant le nouveau venu tout essoufflé.
— Vassine n’aime pas les bombes, non, il ne les aime pas ! s’écria quelqu’un du côté aristocratique.
— Quand c’est nécessaire, c’est une autre chanson, répondit lentement Vassine, que tout le monde écoutait quand il parlait. Le 24, par exemple, ils ont tiré, que c’était une bénédiction ! et il n’y a rien de mal là dedans ; pourquoi nous laisser tuer pour rien ? est-ce que les chefs nous disent merci pour ça ? »
Ces paroles provoquèrent un rire général.
« Et pourtant, voilà Melnikoff qui est tout le temps là dehors ! dit quelqu’un.
— C’est vrai, faites-le donc rentrer, ajouta le vieil artificier ; autrement il se fera tuer pour rien.
— Qu’est-ce que ce Melnikoff ? demanda Volodia.
— C’est, Votre Noblesse, un bêta qui n’a peur de rien, il se promène là dehors ; veuillez l’examiner, il ressemble à un ours.
— Il connaît les sortilèges », ajouta Vassine de sa voix calme.
Melnikoff, soldat d’une forte corpulence, chose très rare, avec une chevelure rousse, un front énorme extraordinai-