Aller au contenu

Page:Tolstoi - La Pensée de l’humanité.djvu/405

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

V. — La mort libère l’âme des limites de la personnalité.

1. La mort est une libération de la personnalité bornée. C’est de ce fait que résulte, apparemment, l’expression de paix et de repos que l’on remarque sur les figures de la plupart des morts. La mort de tout homme de bien est facile et tranquille ; mais mourir avec empressement, volontiers, mourir avec joie, voilà l’avantage de celui qui a renoncé à lui-même, de celui qui renonce à la vie individuelle, de celui qui la nie. Car seul cet homme a réellement envie de mourir et, par suite, n’a besoin ni ne demande d’existence ultérieure pour sa personnalité. SCHOPENHAUER.

2. La conscience du Tout, renfermée dans les limites du corps, tend à élargir ses limites. Dans la première moitié de sa vie, l’homme aime de plus en plus les objets, les gens, c’est-à-dire qu’en sortant de ses limites il reporte sa conscience sur d’autres êtres. Mais quelle que soit la grandeur de son amour, il ne peut sortir de ses limites et ne voit la possibilité de leur suppression qu’en mourant. Comment peut-on craindre la mort après cela ? Il se passe quelque chose d’analogue à la transformation de la chenille en papillon. Nous sommes ici des chenilles : d’abord nous naissons, ensuite nous nous endormons en chrysalide ; puis nous devenons papillons dans l’autre vie.