Les voitures chargées de mirmidons et d’éclopés suivent le zigzag de la grande route. Le gros de la troupe se dirige droit sur le col par la Ramasse. La Ramasse, c’est un sentier qui serpente le long d’une rampe très-rapide ; en été les piétons peuvent seuls le suivre ; mais en hiver, ou du moins quand la rampe est encore chargée de neige, l’on peut d’en haut s’y lancer en traîneau, et au bout de quelques instants l’on arrive à Lans-le-Bourg le nez gelé, et des frimas dans les poches.
Ceux qui suivent la Ramasse atteignent le sommet longtemps avant les voitures, et continuant de spéculer, tout à coup ils découvrent devant eux, au sortir de l’ombre, le lac, l’Hospice, tout le col qui étincelle des feux empourprés du couchant. Point de neige, plus de poussière, un air vif et léger ; la marche est devenue une jouissance, et M. R*** lui-même convient qu’il est des cas où, renversant les termes de sa formule du souverain bien, il exprimerait par le dénominateur que la journée se divise en lieues de marche, et par le numérateur qu’on marche toutes ces lieues avec le plus grand plaisir.
À cette frontière du Piémont, nous trouvons les carabiniers royaux, qui nous prient d’exhiber. Ces messieurs se montrent très-polis, et, comme à l’ordinaire, nous n’avons qu’à nous louer de leurs procédés. Toutefois, le