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mes cherchant en moi leur refuge, elle saisit sa main, et elle la plaça dans la mienne.

Dès ce moment nous fûmes unis. La vraie candeur est confiante, un cœur neuf à l’amour se donne sans réserve ; je trouvai intacts dans celui d’Adèle ces trésors que d’ordinaire le monde souille ou effleure, mais que la retraite embellit et conserve. Remarquable par son élégante beauté, remplie de grâces et d’agréments, douée de cette sensibilité qui, dans une femme, rehausse les talents et les connaissances, son âme généreuse et modeste ne connaissait d’autres plaisirs que ceux de l’affection et du dévouement ; et, en même temps qu’elle semblait prodiguer les grâces de ses manières et de son esprit, je ne sais quelle pudique réserve donnait à ses moindres faveurs un charme plus profond, plus piquant mille fois que celui que des femmes aussi belles cherchent en vain dans les calculs de la plus adroite coquetterie.

Il fut convenu que ces dames achèveraient de passer l’hiver dans cette retraite que leur offrait le bon M. Latour. C’est là que, chaque jour, pendant les rigueurs d’un hiver glacé, je venais avec transport m’enivrer, auprès de cette charmante fille, de toutes les délices d’un amour chaque jour plus vif et chaque jour mieux partagé. Temps de félicité présente et de riant espoir ! jours heureux de ma vie ! non, comme tant d’autres plaisirs que les années emportent sans retour, vous n’avez point passé sans laisser d’aimables traces ; vous fûtes la brillante aurore de ce bonheur que je goûte aujourd’hui ; et mon cœur, en rebroussant jusqu’à vous, n’a point à vous demander compte de douces promesses dont vous l’ayez leurré !

Au printemps suivant, M. Latour nous maria dans