Page:Topffer - Nouvelles genevoises.djvu/316

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there ! Je défendé vos de fiumer ! Si vos fiumé, je refiusé absoliument de payer vos !

— Ah ben ! ceux-là !… vaut mieux mener les bêtes à la foire, dit le guide en remettant sa pipe dans sa poche. Voyons, avançons ! ajouta-t-il. Le temps se brouille, il s’agit de passer les neiges.

Effectivement le ciel s’était de nouveau entièrement chargé de nuages ; toutes les cimes étaient cachées, et le vent, déjà plus violent, faisait tourbillonner la poussière des ravins. Nous montions depuis près de trois heures, et néanmoins le haut du col paraissait encore éloigné. Depuis que nous avions atteint le bas des rochers des Fiz, en même temps que nous laissions derrière nous les dernières traces de végétation, ces rochers, que nous commencions à tourner, nous dérobaient la vue de la vallée de Servoz. La scène était donc changée : à gauche, des rocs verticaux ; à droite, les bases du Buet, toutes de glace et de pierres nues ; autour de nous, une contrée déserte et morne, dont l’aspect n’était varié que par les blanches plaques de neige qui se montraient à chaque instant plus nombreuses, pour devenir bientôt continues.

Milord à Clara : J’avé la suspicion que cette drôle ne connoissé pas la true chémin.

— J’avé aussi, répondit Clara avec un air d’inquiétude.

Milord : Vos méné nous dans iune mauvaise chémin, guide.

— Ici ! c’est pas de quoi se plaindre. Attendez donc d’être en haut. Avançons, avançons !

Clara à milord : Oh ! je craigné beaucoup, mon père.

— Avançons, avançons ! Vous n’avez pas voulu m’écouter hier ; c’est à savoir maintenant comment nous nous en tirerons.