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Page:Torcy (Blieck) - L'exode, 1919.djvu/127

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L’EXODE

Marthe, que Lysette l’avait quittée, préférant la compagnie des Forestier.

— Cela se comprend, dit Marthe, qui atténua l’ironie de ces mots par l’obligeance de son sourire.

Mais Mme Grassoux se redressa, montrant ainsi « que cela ne se comprenait pas ».

Mme Héloir devinait, d’ailleurs, la raison du départ de sa fille. Calixte Grassoux, collégien en mal de croissance et fort occupé de plaire à Lysette, faisait chavirer un écheveau de laine que la jeune fille enroulait en souriant. Sans doute Mme Grassoux prévoyait-elle à cet innocent manège des conséquences lointaines et graves, car elle fit un signe aux « fillettes », qui, aussitôt, se levèrent et transmirent au jeune Grassoux l’ordre du départ. Il parut ennuyé de quitter Lysette, et, se tournant vers M. Forestier, qui l’invitait à rester, il rencontra le regard fixe et sombre de sa mère. Après quoi, traînant ses pas, il suivit la retraite stratégique de ses parents.

Déjà M. Forestier débouchait une poussiéreuse bouteille, tandis que sa femme faisait mettre le couvert.

— Vous avez bien fait de venir, dit le bon rentier ; ici, vous pourrez attendre la fin de la guerre, puis retourner à Bruxelles, quand les Prussiens seront repoussés.

— Je ne demande pas mieux, mon cher Bernard, mais je crains qu’on ne les repousse pas avant deux ou trois mois.

— Qu’importe ! vous n’êtes pas mal ici.