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QUATRIÈME PARTIE

Au tournant de la voie, elle agita son mouchoir, puis la main disparut.

Philippe se sentit plus triste d’avoir un moment rencontré une âme noble qui aurait pu apporter du bonheur dans sa vie et qui, déjà, n’était qu’un souvenir !…

Jamais plus, il n’entendit parler d’elle. Des années après, dans la misère de l’exil, Philippe se rappela l’image de la belle inconnue ; et, souvent, pour échapper aux tristesses du monde réel, il se réfugia, fermant les yeux, dans la douceur de ce souvenir.

Le même soir, en retournant au Refuge, il vit Lucienne déployer un journal :

— Venez vite !… Il y a du nouveau ! dit-elle, montrant une annonce où l’on s’informait de la famille Héloir.

— Qui cela peu t-il être ? demanda-t-il.

On le priait d’écrire au Comité de La Haye.

— C’est Mrs Wood qui m’a passé le journal, reprit Lucienne. Si j’étais de vous, j’enverrais un télégramme.

À quelques jours de là, il reçut ce billet de Frédéric :

« Je suis trop accablé pour vous écrire plus longuement. Nous venons d’apprendre la mort de Léon. Je sais qu’il est mort pour une noble cause, mais cela ne nous console pas. Yvonne est presque folle… Nous avions tout quitté pour le suivre, pour avoir de ses nouvelles, pour lui envoyer un peu d’argent. Et voilà !… Il est mort !… C’est affreux ! »