Page:Touchatout - Le Trombinoscope, Volume 1, 1871.djvu/28

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uns, les pendules suivant les autres. — Il étudia le droit à Berlin, à Gœttingue et à Greifswald. — Quand il eut appris le droit, il s’écria « Dieu !… que je suis bête d’avoir perdu trois ans pour acquérir une science aussi inutile !… Tout le droit tient dans ce vers de La Fontaine : La raison du plus fort est toujours la meilleure… J’aurais su ça par cœur en trois minutes, c’était « tout ce qu’il me fallait !… » Il se fit soldat, devint lieutenant de la landwehr et en 1847 membre de la Diète générale (ainsi nommée parce qu’elle a pour but d’affamer les populations). — Là, il se fit remarquer par la violence de ses théories ; il prétendait que toutes les grandes villes devaient être passées au pétrole, parce que les agglomérations sont toujours le rendez-vous des républicains. À peine âgé de trente-trois ans, cet homme de génie avait compris toute l’importance de cette vérité, qui semble de prime abord un paradoxe : Dans un royaume, plus les sujets sont serrés, moins le roi est à son aise. — Avec de tels principes, M. de Bismark ne pouvait manquer d’être distingué par le roi de Prusse ; en effet, il fut successivement chargé de plusieurs missions diplomatiques à Francfort, à Vienne, à Saint-Pétershourg et même à Paris, où il séjourna peu d’ailleurs ; le temps de prendre l’adresse des meilleures maisons d’horlogerie. — Le 22 septembre 1862, le roi lui confia la présidence du conseil des ministres avec le portefeuille des aff…, pardon ! des pendules étrangères.

Arrivé au pouvoir, M. de Bismark manœuvre immédiatement en vue de la réalisation du rêve de toute sa vie : l’unité allemande. — Il n’est peut-être pas inutile de dire ici en deux mots ce que c’est au juste que l’unité allemande comme la comprend M. de Bismark : Vous prenez trois gros chiens que vous affamez assez pour les rendre furieux ; vous les attachez ensuite avec trois cordes et vous les sortez en laisse autour de votre habitation. Vous avisez un beau Terre-Neuve, qui ne vous appartient pas, vous le faites à moitié étrangler par vos trois dogues et, quand il est terrassé, vous l’attachez à ses vainqueurs avec une quatrième corde. Le lendemain vous rencontrez un riche épagneul qui vous convient, vos quatre chiens sautent dessus ; même jeu que la veille, cinquième corde… le vaincu vient grossir la meute pour la prochaine occasion, et ainsi de suite jusqu’à douze, vingt, trente… il n’y a pas de limites ; plus il y a d’étrangleurs, plus l’opération se fait facilement. Si l’un d’eux regimbe, vous fouaillez fermé dans le tas et vous le faites mordre par les autres. Chaque