redingote impériale et fut fait prisonnier avec son auguste maître. — Cette seconde scène de carnaval valut au prince Louis une condamnation à la réclusion perpétuelle. Il fut enfermé à Ham avec le général Montholon et le docteur Conneau. C’est là qu’il composa sa fameuse brochure sur l’Extinction du paupérisme, où il démontra d’une manière si brillante que s’il arrivait jamais au pouvoir il ferait diminuer le nombre des nécessiteux… en en fusillant une bonne partie. — Le 25 mai 1846 il s’échappa de Ham, déguisé en goujat ; la distinction naturelle de sa tournure et de sa physionomie facilita beaucoup cette évasion.
Lorsqu’éclata la révolution de 1848, Louis-Napoléon accourut en France, sans aigle et sans lard, offrir ses services à la République. On lui fit observer que sa présence en un pareil moment pourrait jeter le trouble dans les esprits ; roué comme potence, il s’éloigna, désintéressement qui lui valut d’être nommé député à la Constituante par cinq départements : le légume préludait à ses plébiscites intelligents. — Le 10 décembre suivant, il était élu président de la République par cinq millions et demi de suffrages potagers et recevait le pouvoir des mains intègres du général Cavaignac.
Vers la fin de 1851, sentant approcher l’échéance de son mandat, Louis-Napoléon sortit de son magasin d’accessoires la fameuse hydre révolutionnaire, qui ne manque pas plus son effet sur les hommes de quarante à cinquante ans que le croquemitaine sur les enfants de vingt mois. — Il représenta à la France que les élections suivantes allaient envoyer à l’Assemblée 750 députés qui ne mangeaient à tous leurs repas que de la viande humaine et que, si elle laissait arriver ces ogres au pouvoir, tous les citoyens ayant plus de neuf cents francs de rente seraient guillotinés. — Pendant que la France affolée d’une telle perspective était en train de se demander : Ah ! mon Dieu !… qu’est-ce que nous allons devenir ? Louis-Napoléon, le 2 décembre 1851, met les députés à l’ombre avant même que le soleil ne soit levé, prend dans sa poche la clef de l’Assemblée, distribue de l’eau-de-vie à la garnison de Paris, fait tirer une proclamation à 100 000 exemplaires et à mitraille sur le peuple, et demande par plébiscite, la présidence pour dix années, ce qui, cette fois, lui est accordé par 7 millions 500 000 suffrages, deux millions de plus que la première fois !… La betterave avait donné. — L’année suivante un nouveau plébiscite posait la couronne impériale sur ce faciès de sergent-de-ville abruti par l’absinthe, et désormais