Page:Toulet - Béhanzigue, 1921.djvu/109

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

Christiane. L’autre ne quittera pas l’affût pour la pour suivre. Et dans ce cas j’ai ma carabine.

En même temps il l’armait, avant de crier : « le tigre », », lorsque Christiane, qui était à cinq ou six pas de lui, et à une douzaine de la bête, se retourna. La lune éclairait son beau visage, où Hubert pensa lire encore une défiante ironie. Peut— être de son côté, distingua-t-elle, sur sa face, une menace suprême.

— Oui, répéta-t-elle alors d’une voix profonde, oui : Rimsky !

De nouveau il se tut. Elle se reprit à courir. Le tigre n’était plus qu’à six pas. Hubert se taisait toujours. À trois pas… à deux pas.

— Christ…

Hubert avait bondi en avant, et sa voix s’étrangla dans sa gorge, — tandis que la chose noire se laissait tomber comme un fruit monstrueux. II ne vit plus sur le chemin qu’une masse confuse, emmêlée, qui, soudain détendue, rebondit dans la brousse. Et alors un cri retentit : un cri inhumain, d’une affreuse longueur, qui était tout l’angoisse, l’agonie, et des ongles déchirant déjà cette beauté précieuse, pour qui tant d’hommes avaient souffert.

…………………….

Quelquefois Hubert est arraché de son sommeil par un cri. Il se réveille en sursaut, les yeux grand ouverts. De toute son âme il interroge la nuit : il écoute l’ombre. Et il n’entend que le noir silence, implacable.