Page:Tourgueneff - Récits d un chasseur, Traduction Halperine-Kaminsky, Ollendorf, 1893.djvu/51

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― Pourquoi ?

― C’est qu’il craint… Vous êtes des chasseurs ! Un malheur est si vite arrivé ! Vous mettrez le feu au moulin. Dame ! des fusils chargés, de la poudre…

― Quelle folie nous dis-tu là ?

― Ah ! écoutez donc : pas plus tard que l’an passé, des colporteurs de viande et de poisson ont passé la nuit ; on ne sait comment ils ont mis le feu chez nous et tout a brûlé.

― Eh ! frère, nous n’allons pourtant pas coucher à la belle étoile !

― Faites comme vous voudrez.

Et il s’éloigna en faisant résonner ses bottes. Ermolaï lui envoya toutes sortes de malédictions : « Allons au village, » dit-il en soupirant ; mais, du moulin au village, il y avait deux verstes.

― Couchons ici, dis-je ; la nuit est chaude ; la meunière, pour de l’argent, nous cédera bien quelques bottes de paille.

Ermolaï approuva sans mot dire et nous nous remîmes à frapper.

― Qu’est-ce que vous voulez donc ? cria de nouveau le garçon ; on vous a dit non.

Nous expliquâmes ce que nous désirions. Il alla consulter son patron et revint avec lui ;