Page:Tourgueniev, Terres Vierges, ed. Hetzel.djvu/339

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rien… ne fais pas attention. — Tu reviens dans une demi-heure, n’est-ce pas ? oui ?

— Sans doute.

— Oui… oui… pardon. Ma tête est toute troublée par l’insomnie… à cause de cette nuit blanche… Moi aussi je serai prêt… tout à l’heure. »

Marianne sortit. Solomine voulait la suivre ; Néjdanof l’arrêta.

« Solomine !

— Quoi ?

— Donne-moi ta main. Il faut bien que je te remercie de ton hospitalité. »

Solomine sourit à peine.

« Voilà une idée ! »

Pourtant il lui donna la main.

« Et puis, écoute, continua Néjdanof, s’il m’arrivait quelque chose, je puis compter sur toi, je peux être sûr que tu n’abandonneras pas Marianne ?

— Ta future femme ?

— Oui… Marianne.

— D’abord, je suis persuadé qu’il ne t’arrivera rien du tout ; et tu peux être tranquille, Marianne m’est aussi chère qu’à toi-même.

— Oh ! je le sais… je le sais… je le sais. Allons, très-bien ! et merci ! Donc, dans une heure ?

— Dans une heure.

— Je serai prêt. Adieu. »

Solomine sortit et rattrapa Marianne dans l’escalier. Il avait l’intention de lui dire quelque chose au sujet de Néjdanof ; mais il ne dit rien, et Marianne, de son côté, comprit que Solomine avait eu l’intention de lui dire quelque chose, précisément au sujet de Néjdanof, et qu’il n’avait rien dit. Et elle ne dit rien non plus.