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Page:Tourgueniev - Étranges histoires (Étrange histoire ; Le roi Lear de la steppe ; Toc, Toc, Toc ; L’Abandonnée), 1873.djvu/109

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Voilà dans quel pétrin tu es tombé !… Si cela s’était passé dans mon régiment, et si j’en avais eu le pouvoir, continua-t-il en aspirant avec violence la fumée de son long tuyau, je l’aurais… je l’aurais traité à coups de plat de sabre… »

Gitkof retira sa pipe et regarda devant lui comme s’il eût aperçu le tableau que son imagination lui retraçait en ce moment. Souvenir s’approcha en sautillant. Je les laissai ensemble et me promis de revoir Kharlof coûte que coûte, tant ma curiosité enfantine était excitée par tous ces propos.

Le lendemain, je partis de nouveau avec mon chien et mon fusil, mais cette fois sans Procope, pour le bois de Ieskovo. Il faisait un temps merveilleux. Je crois que nulle part, hors de la Russie, on ne trouve un temps pareil au mois de septembre. Le calme était si grand qu’on pouvait entendre à plus de cent pas un écureuil sautiller sur les feuilles sèches qui déjà jonchaient le sol, ou bien une branche morte qui, se détachant du faîte d’un arbre, heurtait faiblement d’autres branches dans sa chute, et tombait…, tombait pour ne jamais bouger… dans l’herbe fine. L’air, ni chaud ni frais, mais plein de senteurs et comme légèrement acidulé, vous caressait les joues et les yeux. Un fil de la Vierge, léger comme la soie, arrivait en flottant dans l’air, s’accrochait aux canons du fusil et s’étendait de toute sa longueur, signe certain d’un beau temps soutenu. Le soleil jetait une lumière pâle et douce : on eût dit un clair de lune. Je trouvai des bécasses, mais je