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Page:Tourgueniev - Étranges histoires (Étrange histoire ; Le roi Lear de la steppe ; Toc, Toc, Toc ; L’Abandonnée), 1873.djvu/311

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L’Abandonnée.

sion à Susanne pour lui témoigner… parce que… enfin, à titre de récompense. »

Je joignis les mains.

« Et tu as pu croire cela !

— Oui, je l’ai cru !… Puis, il racontait encore que le jeune aussi… Mais assez, ma conduite est inexcusable.

— Ainsi tu t’es éloigné pour rompre avec elle ?

— Oui ; dans ces cas-là… c’est le meilleur moyen. J’ai agi comme un insensé, comme un insensé ! » cria-t-il d’un ton véhément.

Nous nous tûmes tous deux. Chacun avait conscience de la gêne qu’éprouvait l’autre : j’avais pourtant le cœur plus léger que Fustow : rien ne m’obligeait à rougir de moi !

XX

« À l’heure qu’il est, je casserais bien bras et jambes à ce Victor, continua Fustow en serrant les dents, si je n’étais pas obligé de m’avouer à moi-même que je suis coupable. Je vois maintenant le but de toute cette intrigue… Susanne mariée, ils perdraient la pension ! »

Je lui pris la main.

« Alexandre, demandai-je, as-tu été chez elle ?

— Non ; à peine arrivé, je suis venu directement ici. J’irai demain, demain de très-bonne heure. Les choses ne doivent pas se passer comme cela, non.