Aller au contenu

Page:Tourgueniev - Étranges histoires (Étrange histoire ; Le roi Lear de la steppe ; Toc, Toc, Toc ; L’Abandonnée), 1873.djvu/88

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

Kharlof, auquel n’avait pas échappé la remarque de l’ispravnik.

— Sans doute, conforme en tout point, reprit ce dernier d’un ton à la fois obséquieux et impertinent ; toutefois, vous le savez bien, Martin Pétrovitch, nous ne pouvons pas éviter la forme, et nous avons aussi émondé les détails superflus, car la cour ne saurait en aucune façon entrer dans cette kyrielle de vaches pies et de canards huppés.

— Approche-toi », cria Kharlof à son gendre, qui s’était glissé derrière nous et se tenait dans une attitude humble près de la porte. Il bondit aussitôt près de son beau-père.

« Tiens, lis ; cela me fatiguerait. »

Slotkine prit la feuille de papier des deux mains, et se mit à lire l’acte avec émotion et sensibilité, d’une voix claire, bien qu’un peu tremblante. Les parts des deux sœurs y étaient fixées avec la plus grande minutie. De temps en temps Kharlof interrompait la lecture :

« Écoute, Anna, ceci est pour toi, en récompense de ton zèle » ; ou bien : « De cela je te fais cadeau, ma petite Evlampia. »

Les deux sœurs saluaient, Anna jusqu’à la ceinture, Evlampia en inclinant seulement la tête ; et Kharlof les regardait avec une imperturbable gravité. Le « manoir seigneurial » (c’est-à-dire la maisonnette neuve) était attribué à Evlampia, comme la plus jeune fille, et d’après l’antique usage. La voix du lecteur s’étrangla en lisant ces désagréables pa-